L’on ne va pas se mentir, Street Fighter V qui se voulait la grande révolution du jeu de combat et de sa licence, a quelque peu loupé le coche. La faute à des choix malheureux que toute la communauté impute à Yoshinori Ono, le sympathique producteur de Capcom.
Meilleur VRP que créatif selon les mauvaises langues. C’est pourtant sous sa direction que ce genre devenu désuet a repris de sérieuses couleurs avec Street Fighter IV.
Un succès critique, une ovation du public, difficile de comprendre comment l’homme a pu se rater de la sorte par la suite. Damage control avec un Takayuki Nakayama qui sauve le bébé du bain, Street Fighter V a su finalement trouver son public avec maints aménagements bienvenus.
Ono en disgrâce, le voilà quittant Capcom et Street Fighter. Il fallait tourner la page Ono et montrer aux plus difficiles que le développeur restera le Maître incontesté de la baston avec aux commande du nouveau Street Fighter Takayuki Nakayama.
Une tâche pas si évidente. Non pas que la concurrence fait rage comme dans les années 90, mais celle-ci sait montrer les muscles et plaire aux joueurs. Dragon Ball FighterZ, Guilty Gear, King Of Fighter comme Tekken restent des références et Capcom n’avait d’autres choix que de repenser Street Fighter. Comment convaincre les anciens qui pullulaient dans les salles d’arcade et qui ne jurent que par leurs sticks Qanba et les plus jeunes pas forcément adeptes, mais qui se sont bien volontiers essayés à DB FZ.
De la fraîcheur, de la modernité! Promesse tenue?
Pour se faire, Capcom a revu sa communication. Exit les bons vieux Ryu et Ken, le focus se fera sur Luke arrivé dans Street Fighter V et Jamie. Deux jeunes hommes résolument dans leur époque, bien plus en phase avec une cible que veut conquérir Capcom. Luke devient donc le visage de Street Fighter 6 qui perd son VI de manière fort habile en se transformant en numéro.
Dès le menu, l’on comprend cette volonté de basculer dans le cool. Les couleurs sont flashy, l’ambiance hip-hop, l’ado des 90’s que je suis connaît parfaitement ces codes que la jeunesse aime tant de nos jours. Cela pourrait choquer qu’approchant gentiment la cinquantaine, un sourire de satisfaction s’est esquissé sur mes lèvres.
Ainsi trois univers s’offrent à nous :
World Tour : Sorte de mode aventure.
Battle Hub : Permettant le jeu en ligne et bien d’autres réjouissances.
Fighting Ground : La baston la vraie la dure, en arcade, en ligne, local ou entraînement.
Le World Tour permet de créer un personnage et de s’aventurer dans les rues de Metro City, ville dans laquelle prennent lieu les événement du beat them up Final Fight. Rappelons que ce dernier devait s’appeler Street Fighter 89 ( avec la même typo que pour le II ). La filiation est actée, les deux jeux partage le même environnement.
On y rencontre Luke et un de ses élèves Bosch. Un moyen pour les débutants de découvrir le gameplay Dynamique ( très simplifié) et d’appréhender au mieux le genre en les affrontant, mais aussi pour les plus vieux de se faire la main sur les quelques nouveautés.
Une fois les courtoisies d’usage faites ( après quelques coups bien sentis ), il est temps d’arpenter la ville et de rencontrer beaucoup d’individus avec lesquels il sera possible de combattre. L’occasion de parfaire son entraînement, tout en faisant progresser son personnage qui pourra au gré des rencontres, changer son style de combat comme sa configuration de boutons ( enfin ! ). C’est aussi l’occasion d’en apprendre un peu plus sur l’histoire. Le gang Mad Gear sévit toujours malgré la fin de Final Fight et il ne sera pas rare de se faire agresser par ses sbires. Si la récurrence de ces combats courts et sans grandes techniques peut s’avérer un peu pénible, elle est tout de même nécessaire à la progression. Progression qui peut se faire sans engager un combat, pour profiter des lieux comme dans un Yakuza en visitant des boutiques et en accomplissant des missions.
Anecdotique pour certains, réjouissant pour d’autres, ce mode à le mérite d’exister et offre beaucoup de clins d’œil au passé. Il se parcourt avec plaisir, tant il est généreux. C’était inattendu, c’est désormais bienvenu.
Le Battle Hub se déroule dans un game center ultra moderne, rempli de bornes type Vewlix sur lesquelles sont jouées Street Fighter VI. Ici l’on croise nombre de joueurs du monde entier ( avec des looks souvent improbables) qui n’attendent qu’une chose ; vous affronter. A l’instar d’événements e-sports comme l’EVO, le Tougeki et le Stunfest, il s’agira de prendre une borne et d’attendre que quelqu’un s’installe en face ou inversement pour le combat commence. Un système de chat est aussi disponible entre les joueurs histoire de prendre la température.
Une bonne surprise qui se concrétise avec une zone proposant des bornes avec des grands classiques de Capcom. Final Fight, Street Fighter II Turbo, Super Puzzle Fighter II etc , elles sont à disposition avec autant de credits que l’on veut. L’émulation est bonne et c’est toujours avec plaisir que l’on s’adonne à quelques parties passés les sauvages affrontements.
A noter que comme à l’époque dans les salles de jeux et bars, les jeux des bornes changent régulièrement. Un bon point.
On y trouve aussi une boutique qui vend des articles aux couleurs du Battle Hub et la possibilité de suivre les tournois.
Enfin dans le Fighting Ground plus classique, l’on peut s’essayer au mode arcade pour connaître les histoires des personnages qui ont bien évolué et vieilli , les combats en ligne et en local, les entraînements et les combats dits « Extrêmes » dans lesquels l’on trouvera des obstacles et pourquoi pas un taureau déchaîné prêt à foncer sur le joueur.
Quelque soit l’univers choisi, il est vivement recommandé de s’essayer aux didacticiels forts réussis avec une courbe d’apprentissage jamais décourageante en fonction du niveau de difficulté sélectionné.
Une aubaine pour améliorer sa technique et un nouveau bon point pour Street Fighter 6. J’aurais tant apprécié la même chose quand j’ai débuté sur les jeux Arc System Works…
Tout ceci est bien beau, mais en main? Fidèle à sa tradition de jeu facile à jouer mais complexe dans sa maîtrise ( Street Fighter III et ses évolutions mis à part ), Street Fighter 6 est un régal.
D’abord grâce aux modes Dynamique et Moderne qui offrent à tous la possibilité de s’amuser, mais surtout pour le dynamisme et la finesse des combats.
Immédiatement nerveux, le jeu tape dur et l’on en ressent les impacts dévastateurs.
Une nouvelle jauge appelée Drive fait son apparition. Elle apporte un aspect technique épatant et améliore grandement les affrontements au sens tactique, avec des retournements de situation détonnants.
Se remplissant automatiquement, il s’agira d’en user avec intelligence vu qu’elle mélange la garde Parry et les attaques spéciales. Une fois vide, le joueur se trouve en situation de burnout et est donc vulnérable. Le Parry est hérité de Street Fighter III. Cette garde peu instinctive, consiste à annuler le coup de l’adversaire en allant vers lui. Dans Street Fighter 6 il s’enclenche d’une simple pression de bouton. Pratique.
Sans rentrer trop dans les détails – qui n’est pas le but de ce test – les esthètes seront ravis d’apprendre qu’il existe les Drive Rush, Drive Parry, Perfect Parry, Drive Reversal etc.
Pour le reste, je vous invite à visionner les vidéos de Ken Bogard.
Et un gameplay à ce point bien pensé ne serait rien s’il n’était pas bien servi.
Street Fighter 6 rappelle les gloires du passé. Personne ne manque à l’appel ou presque et c’est un plaisir de retrouver des visages connus, parfois plus burinés et avec des looks différents. On notera les absences des quatre boss emblématiques et de T-Hawk comme Fei Long. A voir par la suite comment évoluera SF6, s’il doit évoluer d’un point de vue scénaristique. De la même manière et vu que l’on est dans Metro City, il serait opportun voire nécessaire d’incorporer des personnages de Final Fight. On voit quelques figures emblématique du Mad Gear dans une ruelle. Il serait bon de faire plaisir aux fans des premiers jours et que Mike Haggar fasse enfin partie du roster. Une nouvelle fois, tout dépendra de la volonté de Capcom.
J’avoue nourrir un fol espoir. Bémol toutefois, dix-huit personnages c’est un peu court et passer par la case carte bancaire pour en avoir plus en DLC, fait toujours grincer les dents.
Aux dix personnages classiques, viennent s’ajouter six nouveaux, assez réussis tant esthétiquement que dans leurs aptitudes au combat avec des effets visuels éclatants lors d’attaques spéciales dû au moteur graphique RE Engine d’une redoutable efficacité.
Street Fighter 6 est un jeu remarquablement réalisé. Le niveau de détail impressionne autant que l’animation, avec de superbes modèles 3D qui se meuvent parfaitement dans un plan 2D. On trouvait Street Fighter V joli, qu’il se voit soudainement ringardisé. A ce point qu’en comparaison, je trouve Street Fighter IV plus cohérent.
Capcom remplit donc ses objectifs. Street Fighter 6 est une véritable réussite, une délicieuse sucrerie pour les gourmands de la baston mais aussi les néophytes. L’ambiance est incroyable, résolument avant-gardiste pour ce type de jeu qui voit l’arrivée des combattants comme s’il s’agissait d’entrées catcheurs avec cette musique très entraînante. Le soin apporté est là et devient signature d’un développeur qui depuis quelques années maintenant, fait montre d’un savoir-faire éprouvé avec des productions généreuses et de haut niveau.
Mon amour pour Capcom reste le même depuis plus de trente ans. Que ces japonais talentueux sachent entretenir cette flamme encore de longues années.
About Jibé Jarraud
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