La mort d’Iwata attriste, mais…

Le monde du jeu vidéo est en émoi : Satoru Iwata, l’emblématique Président de Nintendo vient de nous quitter après avoir succombé à un cancer.

Figure charismatique à la bonhomie évidente qui avait réussi à rompre avec l’autorité proverbiale de son prédécesseur Hiroshi Yamauchi.

Un mal nécessaire; il fallait tuer le Père alors que le programmeur de HAL Laboratory ( Balloon Fight, Mother-Earthbound, Kirby ), devenu Directeur puis Président en 2002, devait corriger les erreurs passées.

Avec une Nintendo 64 très rentable mais dont l’image ternie par une Playstation au firmament, n’a pas sur donner cette impulsion nécessaire au Gamecube face à la concurrence, la réaction était plus que nécessaire. L’ère Iwata révolutionnera Nintendo.

Développeur donc joueur, Iwata percevait le marché à l’inverse des autres constructeurs et préférait nettement miser sur des expériences de jeu, plutôt que la technologie à tout va. En parfaite adéquation avec deux autres génies créatifs de la firme : Shigeru Miyamoto et Gunpei Yokoi.

Miyamoto dans ses interviews courant 90, ne cachait pas son incompréhension face aux balbutiements de la 3D, prétextant qu’un joueur veut un jeu avant la technologie et que s’il devait faire un jeu en 3D, ce serait justement pour proposer autre chose qu’une simple étape graphique. Des propos tenus en plein développement de la Nintendo 64. Ce sera bien son Super Mario 64 qui fera sens.

Yokoi lui, cherchait tout le temps le meilleur rapport coût-plaisir. De ses recherches naîtra la Game Boy, connue pour avoir ridiculisé les autres, avec un processeur faible, un écran monochrome jaunâtre illisible sans rétro-éclairage, quand la concurrence proposait de la couleur. Seul son Virtual Boy lui causera un discrédit sans précédent.

La volonté de reprendre cette même logique, largement poussée par Genyo Takeda ( responsable R&D depuis les débuts) apparaissait donc pertinente. Coup de poker et certainement de chance plus que stratégique, personne n’aurait pu imaginer que la Nintendo DS en 2005 tellement moins sexy que la PSP, dominerait ce marché. Plus fort, c’est bien un GameCube carrossé en Revolution puis Wii qui est présenté en 2006. Techniquement dépassée, incapable d’afficher mieux que du 480P, la petite dernière de Nintendo sera un succès sans précédent durant ses trois premières années.

Le motion gaming fait la différence à moindre coût au grand dam de Sony et Microsoft et leurs investissements colossaux.

Mais la stratégie d’Iwata a connu quelques retours de flamme. Une fin de vie de Wii catastrophique, et une DS qui se voit remplacée par un modèle 3D bien trop cher, mal conçu, sans jeux véritablement accrocheurs à sa sortie. Le grand public ne comprend pas pourquoi changer de console vu qu’elle est estampillée DS et surtout à un tel prix.

Virage à 180 degrés, Nintendo sort enfin des jeux, re-dessine sa machine en XL et reproduit son arrogante victoire contre Sony et sa PS Vita  aux abois.  Un moindre mal.

Et alors que l’accident industriel est évité, Iwata et ses équipes recommencent avec la Wii U. Une incompréhension générale. Pire que pour sa portable, le grand public est définitivement perdu avec une console sans look, bénéficiant d’une tablette qui n’en est pas vraiment une, avec un line up d’une grande pauvreté et là encore au prix fort. Sortie un an avant les PS4 et XBox One, la pauvrette fait grise mine et peine encore à séduire, quand bien même des jeux de grande qualité et en nombre. Trop tard et l’on sent bien que Nintendo comme pour le GameCube joue l’abandon. D’où le projet NX.

Les années post Wii/DS sont noires. Nintendo connaît de mauvais chiffres d’affaire, ses dirigeants baissent leurs salaires et décident de ne plus faire le show durant le salon de l’E3. Les Nintendo Direct sont privilégiés, comme les Iwata Ask. Une communication surprenante et souvent décevante. En plusieurs Nintendo Direct, Iwata n’a fait que s’excuser. Idem devant les investisseurs. Un aveu de faiblesse fort, à l’image des présentations lors du dernier E3 : Catastrophiques. Dommage, l’humour omniprésent est rafraîchissant et tellement agréable.
A condition qu’il soit accompagné d’annonces fortes. Sans quoi…

Iwata avait beau avoir l’oeil qui frise et une sympathie reconnue, que pour beaucoup il n’avait pas l’étoffe d’un Capitaine.

Ce bien apprécié Président n’était-il pas avant tout un développeur. Il y a quelques années, avant que la vague Amiibo ne déferle sur le monde, nombreux ont été les journalistes, les investisseurs à se demander ce que faisait encore l’individu à la tête d’une telle entreprise.

Nombreuses ont été les rumeurs de démission, d’éviction puis l’accalmie de se faire avant que l’infortuné ne quitte le poste bien malgré lui.

Hier largement conspué, le voici désormais salué et regretté.

Pour les joueurs que nous sommes, sa perte nous provoque une certaine tristesse. Pour les financiers sa perte sera celle d’un renouveau, d’une volonté probablement plus agressive, notamment avec la NX et le partenariat sur mobiles avec DeNA. Sans coeur? Il y a une boîte à faire tourner.

On l’aimait bien Iwata le cabotin tout en réserve. Ses interventions nous manqueront assurément, pourtant le temps fera que l’on passera à autre chose. En attendant l’intérim est assuré par Shigeru Miyamoto et Genya Takeda. Un successeur reste à trouver. Sera-t-il de la trempe décisionnaire d’un Yamauchi, ou plutôt celle plus guillerette d’un Iwata?

Nintendo devant se remettre sur les bons rails, la réponse semble toute trouvée…

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Responsable Editorial Grand Sachem de http://ZePlayer.com I Scribouillard dans des zines de JV et éternel amoureux de jeux nippons insensés I Voix dans le podcast Super Retro Mega X sur Radiokawa.com

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