Pikmin 3 : jouer à bousculer les roses

Avec Pikmin 3, la WiiU se dôte enfin, diront les plus grinçants, d’un jeu qui justifierait, un soir de déprime, de pluie et de brouillard, l’achat de la console. Le saviez-vous ? Ils n’ont pas tort… 

J’ai beau être, en effet, on ne peut plus satisfait jusqu’à présent avec la nouvelle console de Nintendo, force m’est de constater qu’elle ne servait plus à grand chose depuis que j’ai terminé New Super Mario Bros. WiiU. L’arrivée de Pikmin 3 est donc pour moi une véritable bénédiction, et bien que l’on dise que « ventre affamé n’a point d’oreille », ma fougue pour ce titre sait se faire raisonnée : on ne rompt pas un jeûne en se jetant sur tout ce qui se joue, et il faut un peu d’intelligence pour ne pas épuiser le corps ou l’esprit…

L’art de cultiver son jardin

J’ai toujours été, depuis le tout premier épisode sur Game Cube, un grand admirateur de la série des Pikmin. Moi qui ne goûte d’ordinaire guère les « RTS », étant particulièrement médiocre à ceux-ci je dois dire (j’ai beaucoup de mal à mener plusieurs fronts à la fois), je me suis surpris à épurer les deux épisodes encore et encore, au point même de les racheter sur Wii pour bénéficier de la maniabilité à la Wiimote qui apportait, selon moi, un véritable « plus » au gameplay.

Difficile de dire ce qui m’a précisément plu : si la « patte Nintendo » a sans doute joué, le dessin des personnages, le rythme de l’aventure, le principe même du jeu, il y a eu un petit « plus » qui m’a fait craquer. Dans le premier épisode, c’était sans doute la fameuse limite des « 30 jours » doublée de celle des journées en elles-mêmes qui donnait un petit côté « rétro » très agréable, puisque ne cherchant pas à caresser le joueur dans le sens du poil ; dans le second, c’était l’ajout de ces « donjons » diaboliques et haletants qui m’a fasciné, puisque j’y voyais là comme un « jeu dans un jeu ».
Les directions prises par chaque épisode, de là, sont relativement distinctes : le premier se veut plus « survie », il faut gérer son temps, ses ressources, ses mouvements et sans aucun doute faire des « galops d’essai » pour savoir où et quand faire ; le second est plus orienté « challenge », il faut savoir diviser ses troupes, résoudre quelques énigmes, battre des boss pervers.

Pikmin 3, et j’en suis ravi, cumule un peu de ces deux qualités. Si la « limite des 30 jours » n’est plus présente en tant que telle, elle est en revanche plus agréablement remplacée par la nécessité de toujours collecter des fruits pour fabriquer de la boisson et nourrir son équipage : plutôt donc que de n’être qu’un élément extérieur  au jeu et, il faut le dire, un rien artificieux, cette limite temporelle vient s’inclure de façon élégante à l’histoire et à la narration du jeu comme si, brusquement, Nintendo venait de se rendre compte que nous n’étions plus en 1990 mais bien en 2013.
L’aspect « challenge », quant à lui, est davantage assuré par des combats de boss plutôt bien pensés et particulièrement éprouvants, qui tirent davantage partie de l’environnement et de l’arène où ils se situent et, bien évidemment, de la nécessité de devoir gérer maintenant trois « chefs d’équipe », ce qui permet aux cartes de s’étendre encore davantage, si cela était possible.

En réalité, plus je joue, et plus je me dis que les défauts que j’avais mis en avant lors de la sortie de la console s’effacent ici, et que Nintendo, peut-être pour la première fois, comprend qu’il doit aller de l’avant s’il désire conserver son « capital sympathie » dans l’industrie.

Bouillon de culture

Cela est d’autant plus étrange car, de la même façon que pour Twilight Princess qui a été « transposé » quasi tel que de la GameCube à la Wii, Pikmin 3 devait d’abord apparaître sur cette dernière : son développement a été de là retardé pour bénéficier de la nouvelle console et je pense que l’on considérer, près de huit mois après la sortie effectivement de la WiiU, que Pikmin 3 marque véritablement l’entrée de Nintendo au sein de la nouvelle génération de machines.

Ce qui me fait dire cela n’est rien de plus qu’une habitude qu’a toujours prise Nintendo pour ses consoles et qui ne s’était, jusque là et pour leurs propres jeux, pas encore réalisée : celle qu’ils adaptent non pas la console à leurs titres, mais bien leurs titres à leur console. Que l’on se souvienne de F-Zero qui justifiait l’existence des boutons flippers de la Snes, de Super Mario 64 pour le stick analogique, de Luigi’s Mansion pour les deux sticks. Certes, pour la WiiU, l’on avait bien eu Nintendoland mais son succès mitigé n’en avait fait qu’un coup d’épée dans l’eau.
Non : ce qui justifie on ne peut mieux l’existence du GamePad, c’est bel et bien Pikmin 3.

 Pourtant, rien, nous dira-t-on, que de plus basique : sa fonction première est d’afficher la carte du niveau en cours, en sus de quelques petits éléments annexes et chiffrés. Mais cette carte, mes enfants, pour un jeu comme celui-ci, est une véritable bénédiction. Un simple coup d’œil et hop ! L’objectif s’affiche. La plupart du temps, principe de l’échelle minuscule oblige, il nous arrive de ne pas savoir où se trouve notre but alors que nous sommes juste à côté ; pouvoir, alors, le situer sans mettre en pause sa partie est d’un confort jaloux, je puis vous l’assurer. Développant alors un strabisme sartrien de bon aloi, un œil qui cueille les cerises et l’autre qui fait le guet, cette idée du gameplay « asymétrique » sur lequel Nintendo a énormément communiquée devient bien plus évidente.
Contrairement à la
DS/3DS où l’œil peut embrasser, sans génuflexions fastidieuses, les deux écrans d’un seul tenant, ici, le joueur est contraint de faire un choix et, dans un RTS, la moindre inattention peut être fatale. Je trouve la chose bien mieux réalisée, je dois le dire, que dans ZombiU, sans que je ne puisse trop expliquer pourquoi : peut-être le côté moins « m’as-tu-vu », comme « allant de soi » me plaît davantage ; le fait également, sans doute, qu’il n’est nul besoin d’appuyer sur une touche pour visualiser la carte, ce qui intègre la chose bien mieux que nulle part ailleurs : il ne suffit que de baisser rapidement le regard, de le relever et nous voilà repartis à l’aventure.

Je sais que cela semble peu et, pourtant, il faut l’essayer pour le croire : le gamepad rend d’une évidence presque « physique » l’existence de ce Pikmin 3. Il permet, habitués que nous sommes à présents à jongler avec plusieurs onglets, conversations, vidéos, etc., de créer une alternative dans le gameplay là où, et même sur DS il faut le dire, il n’y avait que succession, comme, ne serait-ce et parce que c’est un jeu récent, dans Mario & Luigi: Dream Team où les « jeux » avec le visage de Luigi se déroulent en amont de l’action correspondante qu’effectue Mario sur l’écran de jeu.

Des pommes, des poires… (air connu)

 Il y a sans doute un peu, également, de « vitrine technologique » dans ce Pikmin 3 comme jadis avec Luigi’s Mansion : les effets d’eau, le vent dans les hautes herbes, l’animation globale des ennemis ou des pikmins… Tout ceci, combiné à la HD bien évidemment, fait de cet épisode un jeu superbe graphiquement. Après, je ne suis guère apte à juger la chose parfaitement, et sans aucun doute qu’un œil aguerri dira que l’on atteint, à peine, le niveau d’une Xbox360 en petite forme et que nous sommes loin de ce qui a pu être montré sur One et PS4 ; sans doute, mais cela ne devrait pas surprendre.
Il reste cependant que voir toutes ces petites bestioles s’animer sans ralentissement d’aucune sorte, sauter, piailler à qui-mieux-mieux, vivre leurs vies ou répondre aux ordres, est une expérience qui devient ici très « physique », bien plus qu’auparavant : si, jadis, l’on pouvait croire que l’on observait les choses de loin, avec un télescope mille fois grossissant, à la fois très proche et très loin, ici, nous pouvons nous croire comme invisible et accroupi, touchant presque du doigt ces bestioles à peine plus grandes que des insectes et suivre leurs aventures, leurs succès et leurs échecs.

On s’imagine, enfin ! que dans notre jardinière ou sur notre balcon, les pikmins peuvent réellement exister et cela me renvoie à tout un imaginaire, les MiniPouss, Les petits hommes etc. qui n’a de cesse de me fasciner.

J’ignore cependant, si ce jeu aura du succès, la licence Pikmin ayant toujours été certes agréablement accueillie par tous mais ne s’étant jamais réellement révélée comme une bête de course. Sa jaquette, que j’adore pourtant car tellement à part de ce que l’on nous propose ailleurs et ne présentant aucun personnage connu du « grand public », est ainsi très représentative du jeu final et nous change de ces héros encapuchonnés qui envahissent les rayons des détaillants : c’est, enfin, le « jeu vidéo autrement » que défend Nintendo et c’est pour la WiiU, je me plais à le croire, sa première réussite en la matière.  

Mathieu  

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Co-Responsable de Ze Player, Rédacteur sur Grospixels.com, Animateur sur Radiojv.com.

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