Gamongirls.com, blog de High-Tech et jeux vidéo a réussi à faire sa place dans la jungle du net. Dédié avant tout aux femmes, il ne ferme pas ses portes aux hommes bien au contraire. Une belle aventure née grâce à sa génitrice; la Papesse geek de France, du glam et une dame; bonjour Sandrine Camus.
Merci de te prêter au jeu des interviews de Ze Player. Nombreuses et nombreux sont ceux qui te connaissent de par ton blog Gamongirls.com. Justement, en tant que femme, comment es tu venue dans le monde du jeu vidéo apparenté comme masculin?
J’ai aujourd’hui 45 ans et le jeu vidéo m’a toujours accompagné depuis mon enfance. Tout a commencé avec le bien fameux Pong. Ce n’était pas vraiment une console de jeux, mais plus un de ces systèmes qui se branchaient avec des variantes de ce jeu. J’avais fait du charme à ma Grand-Mère pour qu’elle m’offre ce drole de truc et cela avait marché.
Puis j’ai eu la chance d’éprouver de nouvelles sensations de jeu avec l’informatique, notamment sur Mac. Le virus m’avait infecté, et j’ai naturellement été conduite à m’essayer à maints jeux. Ma différence avec les garçons étant que je faisais passer le plaisir avant la technologie. Je ne suis pas une experte de processeurs, de technique.
Et tu as voulu embrasser une carrière dans ce secteur par la suite?
Pas immédiatement. Mes études, et mon arrivée sur le marché du travail m’ont amené à travailler dans le monde bancaire. Rien à voir finalement avec ma carrière actuelle. Pourtant, je n’y trouvais pas mon compte, et alors que la bulle internet commençait à gonfler, j’ai eu un vif intérêt pour cette nouvelle façon de communiquer, de publier. Pourtant, je trouvais cet internet encore trop masculin. A croire que la High-Tech reste un milieu d’hommes. En mon for intérieur, je voulais parler aux femmes, avoir un discours dédié. C’est ainsi que je me suis rapprochée de la presse féminine, j’ai proposé mes services, mais essuyé nombre de refus. C’est la genèse de Gamongirls, ma volonté de vulgariser ce milieu aux yeux des femmes.
Mais alors, pourquoi ne pas avoir rejoint un magazine de Jeux Vidéo?
Une raison évidente à mes yeux. Je n’aime pas le test. Qui suis-je pour donner un avis? Avec quel recul? Je ne peux me permettre de juger qui ou quoi que ce soit, ce n’est pas dans ma nature. Puis, ma vision veut que le jeu vidéo n’est pas qu’affaires d’approfondissements oiseux. Ce loisir a droit à la futilité.
J’aime que cette brave Madame Michu puisse y accéder, l’appréhender. Mon souhait reste que la high-tech en général puisse être grand public.
Gamongirls répond donc à cette exigence.
Du moins on s’y consacre avec Noémie ma rédactrice. Il est vrai que la tendance tend à changer. Les femmes jouent de plus en plus, mais la majorité des publications – internet comme papier – est souvent trop spécialisée pour de nouvelles arrivantes. Les thèmes aussi sont assez axés masculins. Nos papiers sont légers et sérieux à la fois. Emprunts d’humour et de fantaisie.
Gamongirls est détendant. On y cause geekerie, un peu de mode, musique, plein de trucs de filles.
L’Alcove de Gamongirls s’inscrit dans ce process.
C’est une manière de s’affirmer en tant que femme. On aime jouer, mais on aime se chouchouter. Préparer des bons petits plats pour se retrouver ensemble. Faire plaisir et se faire plaisir avec des recettes pour toutes mais aussi pour tous. Épicuriennes et épicuriens sont les bienvenus.
Mais alors, le jeu vidéo est un loisir phallocrate?
Heureusement non. Les filles jouent et depuis longtemps. Sauf qu’au moment de l’adolescence comme certains garçons, elles délaissent les manettes au profit d’autres distractions. Maintenant je peux assurer qu’elles jouent beaucoup et parfois sont meilleures que les mecs ( Nd Jibé : Ma soeur me surclasse nettement sur les Zelda et Mario ). J’accorde que la Wii et la DS ont largement contribué à l’essor des joueuses. Quant à Kinect, c’est une véritable révolution malgré je le concède, son environnement casual évident.
Joueuses depuis toujours, nouvelles venues, comme pour les mecs en somme.
Affirmatif. On retrouve d’ailleurs cette dichotomie entre joueuses confirmées et joueuses casual. Les deux univers sont aujourd’hui très marqués et séparés, pourtant ils coïncident depuis toujours. Il semble qu’ils soient nécessaires pour leurs propres évolutions. Noémie aime beaucoup les FPS, même qu’elle frague pas mal de garçons. L’amusant étant que son péché mignon est de passer du temps sur Cooking Mama. N’oublions pas l’iPhone ou les solutions sous Android qui démocratisent largement l’accès aux jeux vidéo et que dire de l’avènement des tablettes. Forcément, la PSP et la DS intéressent moins. Disons le clairement elles risquent de devenir obsolètes.
A ce titre Sandrine, comment vois tu l’évolution du media?
Reconnaissons le, celles et ceux qui ont essayé la 3DS ont été bluffés. C’est très impressionnant et réjouissant. Il faut pourtant raison gardée et se méfier de simples démos techniques. Le in Game démontrera ou non la puissance et l’intérêt que l’on pourra lui porter. Je crois aux tablettes comme indiqué précédemment, à de nouvelles manières de jouer, et à l’ergonomie. Mais comment les jeux vont-ils évoluer quant on sait que le cœur de cible du marché a 30-35 ans? A ces âges, l’on a moins le temps de se consacrer aux jeux qui pourraient devenir plus courts, plus simples. Les femmes elles, iront vers la technologie la plus évidente à prendre en main, et s’affranchiront de branchements, de manettes et de processeurs qui ne leurs parlent pas. Le tout en un à leur portée.
Le travers reste que ce que l’on appelle casual gaming, prenne l’ascendant et que l’on ne trouve que des jeux sans grand intérêt, limite stupides. On l’a bien vu avec les titres de fitness, party games, danse, musique et autres délires tout aussi variés qu’inconsistants.
Revenir à l’essentiel, au jeu pur et dur est une nécessité si je te suis.
Totalement. Il serait bon que le jeu vidéo redevienne complexe.
La simplification n’est pas une mauvaise chose, tant que le fond reste du jeu. L’Arcade comme la majorité des jeux des années 80-90 étaient basés sur ce principe. Pas de chichis, pas de fioritures et ils gardent encore aujourd’hui leurs auras. Efficaces et évidents. C’est hélas un vœu pieu, le marché et ses sirènes financières pourraient guider la donne autrement.
Que crains tu?
Les constructeurs, les éditeurs nous prennent pour des vaches à lait. Jouer est devenu un loisir bien onéreux. On pourra toujours gloser longuement sur les francs constants et courants que le prix d’un jeu est devenu une véritable problématique. Surtout que ce même prix se voit parfois dévalué en moins de six mois et de manière significative. Quelle valeur alors lui accorder? Et honnêtement; que penser des extensions payantes, de ces fameux DLC. On paye encore et toujours. Passe encore pour un rallongement significatif d’une durée de vie, mais des fringues? Tu veux un Ryu plus stylé? Sors le porte monnaie. C’est lamentable et l’on voit la même chose avec les avatars de la Xbox. Le pire étant de payer un scénario de 15 minutes pour Heavy Rain ( Ndlr : Taxidermiste). Le rapport temps prix est clairement en défaveur du joueur.
L’argent. Le nerf de la guerre.
Que oui ! Et ça me révolte. Voir un jeu téléchargeable au prix voire plus cher que le même en boite est une aberration. Comment un produit dématérialisé peut-il se retrouver au même prix qu’un manufacturé, ayant connu un réseau de distribution? Quelque part, le marché court à sa propre perte. Beaucoup de jeux sont faits à la va vite et répondent à des exigences financières. On produit des blockbusters souvent creux, qui engendrent des suites tout aussi insipides. Le phénomène n’est pas que pour les jeux dits gamers. Regardons ce qui est proposé pour les enfants. C’est totalement inadapté. Au risque de paraitre triviale , c’est de la merde. Est-ce qu’il y a des développeurs, des créatifs derrière tout ça? A se demander s’il n’y a pas que des As du marketing qui n’ont jamais joué de leur vie.
Pourtant Sandrine joue n’est-ce pas?
Oui car il tout n’est pas si noir. Mon iPhone est devenu la machine sur laquelle je joue le plus. J’y passe un temps monstrueux pour une raison simple, la rapidité et la simplicité des jeux comme je te disais. Je passe de petits moments, jamais trop courts, jamais trop longs mais très divertissants. Pas de prise de tête, juste du plaisir. De Facto ma DS prend la poussière. Moi qui l’est tant aimée… J’aime beaucoup passer du temps sur les jeux Lego notamment Harry Potter pour les mêmes raisons. J’y reviens sans obligation. Mais n’allez pas tirer de conclusions trop hâtives sur ma façon de jouer ou mes préférences. J’ai depuis quelques années une véritable histoire d’amour avec Peter Molyneux. J’entends déjà les bouuuuuh mais je m’en moque, ce Monsieur est un véritable créateur et un formidable conteur. La saga Fable répond à mes attentes, malgré ses terribles défauts. C’est un des rares jeux actuels qui soit capable de nous faire rêver, voyager. Molyneux a compris l’essence même de ce qu’est le jeu vidéo et sait nous le restituer. Mon autre amour vidéoludique va à Eric Viennot, un autre grand narrateur à qui il faut se frotter tant ses jeux – hélas trop rares – sont profonds et envoutants. Deux grands charmeurs que ces deux là.
Puis ayant une ribambelle de gamins à la maison, j’ai du me procurer Kinect. C’est formidable avec la plus jeune et j’encourage les parents à faire de même. Vous passerez des moments délicieusement complices avec vos petits.
Merci pour toutes ces précisions Sandrine. Et avant de conclure, Ze Player a une tradition, poser des questions rapides.
A quoi as tu le plus joué?
Si je me réfère à l’enfance Pong, je n’avais que ça ( rires). Plus sérieusement, j’ai passé de longues heures avec Duke Nukem, Doom, et Half Life. Avant j’étais une joueuse PC… et bourrin !
Quel jeu t’a le plus marqué?
Un n’est pas possible, je propose donc plusieurs.
Max Payne. Remarquable d’intensité et d’émotion. Un vrai film noir des plus prenant.
Sinon tout ce qu’a pu faire Eric Viennot et je ne le dis pas par amitié. In Memoriam comme L’Oncle Ernest sont brillamment écrits. D’une très belle poésie.
Toutes confondues, quelle est ta machine préférée?
Au risque de te décevoir, je ne suis pas une grande nostalgique. Alors je vais te répondre actuellement. La 360 et pourquoi pas l’iphone.
Quel jeu annoncé attends tu avec impatience?
Je n’ai aucune attente particulière. En vérité, je n’attends plus rien vu l’évolution. Pour sûr que si je devais attendre quelque chose, ce ne sera pas une suite.
Et le jeu que tu fantasmes ?
Le prochain Viennot ! Eric est un ami qui nous veut du bien. Je m’adresse à toi Eric. Fais moi pleurer, trembler une fois encore, tu es indispensable.
Et pour conclure ; A la terrible question Amiga ou Atari ST, lequel remporte ton suffrage?
Aucun ! C’est une question bien trop technique. Y a que les mecs pour se poser de telles questions (rires).
Propos recueillis par Jibé
About Jibé Jarraud
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Scribouillard dans des zines de JV et éternel amoureux de jeux nippons insensés I
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