Du retour de la 2D

Loin d’être au crépuscule de ma vie du haut de mes 31 ans, souvent je me retourne vers ce qui semble être un vestige de souvenirs d’une époque lointaine mais si belle : mes étagères de jeux vidéo. Il faut savoir que j’ai grandi dans ce que l’on a désormais coutume d’appeler l’âge d’or. Age d’or qui a vu naître le déclin de la 2D…

 

Pourtant aussi curieuse puisse être la vie, on voit depuis quelques temps un retour en force de la 2D dans nos salons, et que les développeurs reviennent finalement à leurs premières amours.

Mais pourquoi donc ?

RETROGAMING ET NOSTALGIE OSTENTATOIRE

Certainement que vous l’avez remarqué, mais jouer ancien est à la mode. Jamais les prix sur Ebay ou dans les boutiques n’ont à ce point explosé! Si vous vous promenez le long d’un boulevard parisien fort célèbre en la matière, vous pourrez avoir facilement des arrêts cardiaques tant les prix exercés sont abusifs et lamentables surtout quand on sait qu’un jeu Super Famicom vendu 90 euros a été trouvé au Japon dans le fameux quartier Akihabara pour 5 euros…

Mais finalement ce n’est pas ce point qu’il faut développer, et laissons ces escrocs notoires dans leurs sordides échoppes. Non s’il y a un retour à la 2D c’est surtout en premier lieu grâce aux émulateurs de ces vieilleries pixelisées qui nous ont fait tant rêver nous les plus vieux , et qui amusent du coin de l’oeil les jeunes générations qui une fois le pad en main se disent « Ah ben mince alors c’est pas mal du tout finalement ».

Le côté immédiat d’un gameplay en 2D couplé à des graphismes souvent riches en détails donc attachant fait de facto mouche.

Nintendo avait bien compris le phénomène avant tout le monde, en proposant sur sa Gameboy Advance, nombre de jeux qui n’étaient ni plus ni moins que de simples portages de sa machine fétiche la Super Famicom/ Nintendo. Et curieusement le public ne s’est jamais plaint d’avoir des graphismes de deux générations passées alors que Playstation 2 ou autres Xbox se faisaient la guerre.

L’intérêt est donc bel et bien présent tant pour les joueurs qui s’amusent avec des concepts simples mais efficaces, que pour les développeurs ou programmeurs qui se frottent les mains en redonnant une seconde vie et j’insiste COMMERCIALE à des jeux déjà rentabilisés. Du 100% bonus.

C’est ainsi que l’on a vu fleurir sur les 3 nouvelles consoles la possibilité d’acheter quelques-uns de ces jeux moyennant finance.

La Xbox 360 , via le Xbox Live Arcade qui propose un catalogue de bons titres anciens comme Castlevania Symphony of The Night, Sonic, Streets Of Rage 2 ou Bomberman

La PS3 n’est pas en reste même si son catalogue retro peine pour le moment à convaincre.

Par contre chez Nintendo c’est la fête, vu que l’on peut récupérer les jeux NES, Super Nes, Nintendo 64 plus le catalogue Sega avec Megadrive et Master System, plus la Neo Geo et surtout la machine la plus exotique mais la plus significative de ce que pouvaient-être ces années 90 : La Pc Engine!

Evidemment, ce n’est pas gratuit, c’est même souvent cher pour ce que c’est, mais l’engouement est réel et l’argent peut donc tomber dans les poches des constructeurs avec un investissement mineur de leur part.

Car oui, la 2D ne coûte rien par rapport à la 3D et devient source évidente de revenus faciles.

C’est ainsi que sur ces mêmes portails de téléchargement on trouve des jeux nouveaux et développés exprès pour le téléchargement. Alien Hominid qui à la base était un jeu en flash se retrouve en HD comme l’excellent REZ. Car la 2D devient la source première de création et d’originalité.

LA 2D AU SECOURS DE LA CREATIVITE ET DE L’ORIGINALITE

En effet, nous sommes de plus en plus nombreux à lorgner régulièrement sur les Xbox live arcade ou Playstation Network, histoire de trouver un petit jeu bien sympa qui va pouvoir tuer le temps entre deux parties de Gears Of War ou Uncharted.

Ces jeux simples d’aspect, sont souvent très surprenant une fois le pad en main. Certains sont mêmes assez jolis et surtout terriblement accrocheur. Pour revenir sur Alien Hominid par exemple, beaucoup de joueurs habitués à la 3D et ne jurant que par ce modèle ont été séduits par le fun et l’ambiance de ce jeu avec ses graphismes délirants et superbes. Comme quoi de simples dessins vectoriels peuvent soudainement faire battre le coeur du plus intégriste défenseur du mapping.

Car il faut reconnaître que dans un monde où cette créativité se perd hélas mille fois hélas, ces petits développements sont rafraichissants et salutaires pour ce qui s’y essayent. Mieux encore cela permet à quelques acharnés de la programmation de se faire un nom alors qu’ils sont dans leur chambre d’étudiant. En ce sens la chose est forcément bonne, et il devenait urgent que le gâteau ne soit pas uniquement partagé par les plus puissants. Même si leur part sera maigre en comparaison, ces petits développeurs pourront proposer une alternative réelle et concrète; et qui sait à défaut de manger la crème pâtissière, au moins se boulotter la cerise, ce qui est déjà énorme.

Car il est loin le temps où Eric Chahi faisait tout seul chez lui des monuments comme Another World…

Pourtant, comme j’ai pu l’expliquer plus haut, la 2D est le seul moyen de redonner un coup de boost au marché qui s’asphyxie entre les licences et la règle du joueur devenu consommateur, le jeu étant devenu un produit de consommation courante.

Développer un jeu comme Assassin’s Creed est devenu une source colossale d’investissements. On comprend mieux que développeurs et éditeurs ne prennent pas de risques, sans quoi si le jeu est un flop, c’est le studio qui ferme ses portes. Terriblement logique…

En 2D l’investissement n’étant basé que sur quelques personnes et beaucoup de talent, si le jeu est un flop, le retour sur investissement ne sera pas fatal. Quant aux économies d’échelles réelles, elles permettent un véritable fond de roulement pour que la boite reste pérenne. On cause économie oui, mais c’est ma transition au chapitre suivant.

LA 2D: UN MODELE ECONOMIQUE RENTABLE

On l’a vu, ressortir les vieux jeux sur des plateformes de téléchargement, permet au éditeurs de faire rapidement de l’argent en profitant du buzz retrogaming. Mais au delà de cette petite escroquerie de leur part, c’est bien l’investissement qui compte.

Prenons les éditions Ankama ( Une boite française, cocorico! ) qui se sont lancées dans la jungle du jeu vidéo avec un apport de 9000 euros et trois associés ( dont les prénoms forment An-Ka-Ma ). Paris invraisemblable, mais paris tenu! Dofus, leur MMO RPG à pas cher, a réussi le tour de force d’ être un succès commercial certes, mais surtout à fédérer une horde de joueurs ne jurant que par lui. Son interface simplifiée, alliée à des graphismes adorables et un abonnement défiant toute concurrence a pu convaincre des joueurs de World of Warcraft qui ont de fait délaissé le soft de Blizzard et ses graphismes en 3D pour un jeu plus simple et bien moins adulte.

Forcément, l’investissement de Ankama par rapport à Blizzard est dérisoire, mais n’allez pas croire pour autant que Dofus est cheap, bien au contraire! Le soin apporté aux dessins en flash est réel, et franchement le jeu dégage un charme tel que l’on prend un véritable plaisir à le parcourir. Moi-même qui ne suis pas un adepte du MMO RPG, je me suis laissé tenté durant quelques heures tant c’est bien fichu et agréable.

De fait, on peut se souvenir de ce que disait Shigueru Miyamoto avant la sortie de la Nintendo 64, quand il affirmait « Je ne pense pas que les gens veulent de la 3D, ce qu’ils veulent c’est un jeu avant tout ». Et force est de constater que le Maître reste le visionnaire que l’on connaît.

En effet, quelques gros RPG comme Valkyrie Profile 2 sont restés sur le modèle de la 2D, et que dire de Disgaea ou du prochain Odin Sphere quand il sortira chez nous? Des graphismes en 2D enchanteurs avec une ambiance magnifique.

Plus fort encore, depuis que Sega a initié le principe du Cell Shading avec Jet Set Radio sur Dreamcast, nombreux ont été les développeurs à reprendre cette excellente idée. Ainsi Zelda The Windwaker ou plus récemment Eternal Sonata ont su tirer partie avec brio de cette charte graphique.

L’intérêt est réel pour les créatifs. N’oublions pas qu’à la base, tout est d’abord affaire de crayonnés sur papier. Il sera bien plus aisé de reproduire un dessin en 2D voire en 3D par le truchement du cell Shading, que de créer un quidam avec le mapping qu’il faut et donc les investissements techniques et financiers qui en découlent.

Et à votre avis, pourquoi une boîte aussi prospère que Capcom, lance son prochain Street Fighter 4 sur une base 2D semi 3D ? Bien entendu que l’économie est primordiale, mais surtout parce que revenir à des fondamentaux est aujourd’hui ce que demandent une majorité de joueurs.

Alors la 2D est-elle l’avenir du jeu vidéo? Il est encore trop tôt pour le dire, mais les signes sont là, et cette technologie n’a pas fini de faire parler d’elle. A une époque où l’on parle de Casual Gaming, à une époque qui voit le départ de Phil Harrison de chez Sony critiquant le manque de simplicité et de social gaming de la PS3, et à une époque où finalement on pleurera toujours plus de bonheur devant des choses simples mais efficaces, alors on peut se poser raisonnablement la question ; car n’oublions pas que l’histoire n’est qu’un éternel recommencement.

Jibé, qui préfère cependant les formes féminines en volume

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Responsable Editorial Grand Sachem de http://ZePlayer.com I Scribouillard dans des zines de JV et éternel amoureux de jeux nippons insensés I Voix dans le podcast Super Retro Mega X sur Radiokawa.com

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