Mathieu (8) : Sexe et jeu vidéo

Zeplayer a été victime, hélas et à notre grand malheur, en repos ces derniers temps alors qu’une actualité assez dense bouleversait le média dans sa totalité. Je parle bien sûr d’un évènement tout particulier sur lequel j’aimerai ici revenir, l’article de Mar_Lard sur le sexisme dans la communauté « geek ».

 Cet article, paru sur le site cafaitgenre.org a été depuis longuement, profondément commenté et il n’est pas peu dire que la grande majorité de ceux qui ont eu l’occasion de le lire ont réagi, ne serait-ce que par l’intermédiaire d’un message dans un forum consacré. Sur Grospixels, j’ai moi-même participé avec d’autres à une longue et haletante discussion sur celui-ci, même si nos réflexions se sont davantage concentrées sur la représentation des sexes  (et de la sexualité) dans le jeu vidéo en général. Je vous enjoins, si vous en avez le courage et le temps, à parcourir ledit topic que je trouve assez exemplaire de flegme et de qualité argumentative, car tous les points de vue, ou presque, y sont représentés et défendus avec conviction mais respect mutuel.

  Je ne me lancerai donc point ici sur une analyse ou une critique des propos de Mar_Lard, d’une part parce que j’ai mené une profonde réflexion d’ores et déjà sur Grospixels et, qu’ensuite, je pense dire que la « glose » ayant été abondante, il ne m’est nul besoin de revenir sur les points forts et les points faibles, ou supposés forts ou supposés faibles de cet article : quiconque les cherchera les trouvera avec assez de facilité.

   De là, de quoi pourrais-je donc bien parler ?

   De ce qui ferait pourtant l’un des points essentiels de toute cette discussion : la formidable réactivité du public concerné suite à l’article.

  Cela n’a pas cessé de me fasciner. Le sujet m’a semblé provoquer un très grand nombre de réactions diverses, de toutes natures, autant pour s’indigner que pour témoigner ; on a étudié le fond, on a étudié la forme, on a étudié les exemples ; on en a proposé d’autres, on a remis en question ceux proposés ; on était d’accord avec le propos général, on était en désaccord avec des détails ou le contraire ; et ainsi de suite. L’espace d’un instant, même si le soufflet finira toujours par retomber à un moment donné, c’est une belle partie de la communauté des joueurs – et des non-joueurs – qui a voulu réagir sur un thème qui, d’ordinaire, ne concerne qu’une frange malheureuse de la population. Il suffit, par incidence, d’observer les réactions et les commentaires des autres articles de cafaitgenre.org ou, même, sur Grospixels le nombre de réponse et l’intense activité qui a été observée : ce sujet a su provoquer une discussion très stimulante.

   L’on pourra toujours dire que si la « communauté », quelle que soit la réalité que l’on voudra bien mettre derrière ce mot, a autant réagi, c’est qu’elle se sentait comme « blessée » ou attaquée en son sein, et il est vrai que l’on peut observer ce genre de choses lorsque la télévision par exemple, ou la presse écrite, se pique de faire comme elle en a parfois l’habitude un entrefilet sur le jeu vidéo, et les chevaliers blancs de venir défendre un loisir que l’on présente ci et là comme trop dangereux.

   La différence est cependant celle-ci : d’une part l’article a été écrit par une joueuse (et non pas par quelque pigiste ou universitaire barbu et dédaigneux), d’autre part il ne vient pas comparer le jeu vidéo en opposition avec autre chose (et notamment avec les exercices de la lecture, la réussite scolaire ou professionnelle ou avec la vie en société tout court) mais en association avec d’autres travers régulièrement relevés un peu partout. Autrement dit, et c’est là aussi quelque chose qui tend à surgir, de façon sourde même, de l’article de Mar_Lard, c’est que le jeu vidéo sur lequel elle se base n’est qu’une illustration d’un plus vaste problème (de sexisme, de représentativité des genres, de l’influence du patriarcat, pick your poison comme dit l’autre), qui touche tout autant la société que la culture, les films, la télévision, la bande dessinée, le jeu vidéo et même, le concernant, autant le jeu vidéo en et pour lui-même (personnages, scénarios…) que le petit monde (journalistes, éditeurs, bloggeurs…) qui gravite autour de lui.

   Quelque part, grâce à cette charge, le jeu vidéo est sorti davantage encore de son autisme. Car il faut se rendre à l’évidence : autant j’ai pu apprécier, comme tout un chacun je présume, que le jeu vidéo soit mon, « notre » petit pré carré, un petit univers avec ses propres règles, ses propres codes, presque avions-nous une façon magique de se serrer la main afin de se reconnaître dans la foule, autant il nous faut reconnaître que la situation a changé du tout au tout.

   Car aujourd’hui, cette situation n’est plus tenable. Tout le monde s’y intéresse ; tout le monde y touche ; tout le monde a un avis sur la question, parfois juste et éclairé, parfois plus naïf et hâtif, mais le jeu vidéo est devenu, et il devient de plus en plus, un phénomène populaire, dans le vrai sens du terme : il ne devient plus l’apanage de certains, il appartient à présent à tout le monde et les choses ne sont pas prêtes de rebrousser chemin.

   Curieuses réactions que celles de certains joueurs qui, après avoir hurlé pendant des années leur passion et l’envie de la voir être reconnue comme « naturelle » de brusquement se raidir et de s’approprier la chose comme un enfant saisit son ballon alors qu’un camarade s’en approche doucement !

   Que nous faut-il alors retenir avant tout, selon moi, de l’article de Mar_Lard et d’autres qui surgissent ci et là ?

   Qu’hélas, il y a un problème au niveau de la représentation des sexes dans la société, en politique ou dans les œuvres culturelles.

   Qu’hélas, il y a un problème au niveau de la représentation des peuples et des religions, en politique ou dans les œuvres culturelles.

  Que cependant et heureusement, le jeu vidéo est concerné par ses problématiques (vous souvenez-vous des polémiques ayant entouré Resident Evil 5 ?).

  Bienvenue à tous dans le monde des Hommes. Ne faites pas attention au désordre : nous nettoyons au fur et à mesure, mais y’a encore du boulot.

    Mathieu

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Co-Responsable de Ze Player, Rédacteur sur Grospixels.com, Animateur sur Radiojv.com.

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